Batman et Red Hood : Sous le Masque Rouge

Sarajevo... Le Joker, l'ennemi héréditaire de Batman, a réussi à capturer Jason Todd, alias Robin, l'allié de toujours du chevalier masqué.
Armé d'une barre à mine, le psychopathe torture et frappe sans relâche le jeune garçon jusqu'à le laisser moribond dans un entrepôt voué à exploser. Batman arrive trop tard : la cachette du Joker vole en éclats et le chevalier noir reste prostré lorsqu'il ramasse la dépouille de son fidèle ami sans vie...

Gotham City... 5 ans plus tard. Un homme vêtu d'un casque rouge, se faisant appeler Red Hood (un avatar qui évoque la probable première identité masquée du Joker), sème la terreur au sein de la pègre puisqu'il n'hésite pas, contrairement à Batman, à tuer les criminels.
Batman, réprouvant ce genre de méthodes, en vient à poursuivre cet individu, aidé de Nightwing (qui n'est autre que Dick Grayson, le jeune garçon qui le premier portait le costume de Robin avant de s'émanciper du héros masqué avec cette nouvelle identité). Mais Red Hood semble être parfaitement au fait des techniques de Batman, se montre très entraîné et échappe à nos héros.
Black Mask, le chef de la pègre, s'inquiète de la montée en puissance de Red Hood, qui a juré sa perte en s'attaquant à son cartel du crime, et décide de s'adjoindre l'aide du Joker pour tuer ce gêneur. C'est au même moment que Batman découvre horrifié l'identité de ce nouvel ennemi... Il s'agit bien de Jason Todd, le second Robin, revenu d'entre les morts grâce à Ra's al Ghul, un ennemi de Batman, et ses bains de jouvence...

Le jeune garçon, furieux de voir que Batman n'a jamais tué le Joker pour venger sa mort, a décidé d'imposer une justice expéditive qui n'a pour but que de remonter au Joker et lui faire subir les pires sévices en représailles du passé... Mais alors que Batman et Jason se font enfin face à l'heure des règlements de comptes, quelle issue va s'offrir à ces dramatiques retrouvailles ?

S'il existe de nombreuses adaptations en films animés sur la franchise de Batman, plus ou moins intéressantes, ce "Batman Under the red hood", 8ème réalisation de la collection "DC Universe Animated Original Movies", a pour privilège de se classer parmi les films préférés des fans du chevalier noir, pratiquement à égalité avec l'indétrônable Batman contre le fantôme masqué, comme pour souligner les grandes qualités de ce nouveau métrage.
Il faut dire que ce film adapte des moments parmi les plus cultes et noirs de toute la saga Batman : la mort (et la résurrection en tant que supervilain cette fois) de Robin...

A la fin des années 80, après des années d'histoires plus légères et des dessins animés gentillets (sans oublier le feuilleton kitsch et décalé), la vie de Batman prend une tournure plus dramatique. Jason Todd, le garçon qui a remplacé Dick Grayson dans le rôle et le costume de Robin, est particulièrement impopulaire aux yeux des fans de la bande dessinée.
Les scénaristes de l'époque mettent alors en place une opération exceptionnelle consistant en un vote auprès des lecteurs qui allait déterminer le sort du jeune prodige dans les planches à venir ! Selon les résultats, l'un des deux épilogues prévus allait être publié ! Avec plus de 10 000 votes par téléphone et avec une petite majorité se prononçant pour la fin de Robin, il est donc décidé de tuer le superhéros.
"Un deuil dans la famille", BD dans laquelle le Joker piège donc le partenaire de Batman et le tue à coups de barre à mine, devient culte avec le temps, plus par l'originalité de sa mise en œuvre et le fait qu'elle mette en scène le meurtre d'un héros célèbre que pour le fait même qu'il s'agisse de la mort de Robin, qui ne fait en fin de compte pas grand écho dans les médias, mais change radicalement la face de Batman, qui devient dès lors un personnage beaucoup plus noir et torturé qu'auparavant, alors même que va sortir sur les écrans le premier film de Tim Burton (avec Jack Nicholson) où cet aspect commence à être mis en place, mais reste survolé.

"Batman et Red Hood : sous le masque rouge" prend pour point de départ le fameux passage à tabac de Robin, revisité et réécrit (les circonstances de la capture de Robin sont différentes : dans la BD, il recherchait sa mère et tombait dans un piège, ici il est juste à la poursuite du maniaque à la peau blanche, qui s'est allié pour l'occasion à Ra's al Ghul avant que les évènements ne dégénèrent). De même, l'histoire principale du film est adaptée de ce qu'on pourrait considérer comme la suite de "A death in the family" parue dans les années 2000, à savoir "Under the hood" qui justement voyait le retour invraisemblable de Jason Todd. Dans la BD, Todd revenait à la vie suite à une histoire un peu compliquée d'altération de la réalité mettant en scène Superboy. Dans le film, le personnage de Ra's al Ghul est impliqué, le vilain voulant "réparer" sa faute indirecte d'avoir mis Robin entre les mains du Joker à l'époque, en le ressuscitant...
Le choix de Red Hood, réactualisation d'un vieux supervilain, comme nouvelle identité pour Jason, prend aussi tout un sens : Red Hood aurait été la toute première identité masquée de l'homme qui allait devenir le Joker, selon les propres dires du criminel à la peau blanche, avant qu'il ne tombe dans une cuve de produits toxiques qui lui auraient donné l'apparence qu'il arbore aujourd'hui... Mais les origines du Joker sont tellement floues et ont tellement été remaniées par les propos du psychopathe lui-même qu'il est difficile d'établir cette histoire comme formelle.

Outre des qualités techniques évidentes, le film est loué pour son intrigue palpitante et rencontre un réel succès. S'il réadapte et modifie forcément quelque peu l'histoire du comics, il ne lésine pas sur la violence et restitue la folie furieuse et imprévisible du Joker. Mais surtout, l'histoire reste haletante, avec un Jason Todd revenu d'entre les morts, qui reste déchiré par son affection pour Batman et fou de douleur de voir que l'homme qui l'a arraché à lui est toujours vivant "au nom de la justice et du droit à la vie". Le final est à ce titre poignant et rien ne laisse présager de l'épilogue pour qui n'a pas lu la BD.
Remarquablement mis en scène, avec des flashbacks nous montrant l'évolution de Robin (son costume, mais aussi son comportement indiscipliné qui comme dans la BD le conduira à sa perte), ce film s'impose aisément comme une des perles des Direct-to-DVD de Warner Bros. Malgré sa violence et sa noirceur, il passe enfin à la télévision sur une des chaînes dérivées de Canal + en décembre 2013, mais très tard (à plus de 4h du matin !).