Pingu

Pingu est un enfant manchot dont les petites aventures se déroulent essentiellement et évidemment en Antarctique. Il vit avec sa famille – son père est facteur et sa mère s'occupe du foyer – dans une maison dont les caractéristiques sont très proches de l'igloo, voire semblable à l'habitat traditionnel des eskimos de l'Arctique, celle-ci bénéficiant du confort moderne comme l'électricité, un poêle, le téléphone et divers autres ameublements et aménagements telles les fameuses toilettes qui occupent tout un épisode. A ce propos, petit détail visuel amusant dans un certain degré de contradiction, voire touchant à la 4ème dimension, vu de l'extérieur l'habitation semble être de taille très modeste, proche justement d'un véritable igloo, alors que vu de l'intérieur la pièce principale est très spacieuse et qu'il y a plusieurs autres grandes pièces comme la salle de bain et les chambres... Quant au grand-père du petit manchot, musicien à ses heures, il vit non loin de là dans la petite communauté dans son propre igloo.

Peu après ses premiers pas à la vue des petits téléspectateurs, Pingu fera la connaissance de sa petite sœur Pinga venant de naître et qu'il aura aidé à couver. Celle-ci l'accompagnera alors dans nombre de ses occupations, jeux et autres balades... Outre les jeunes manchots Pingo, Ping et Pink, ses amis et camarades d'école avec qui il joue souvent (et avec qui il se chamaille parfois pour de suite se réconcilier), Pingu s'est également lié d'une grande amitié avec Robby le phoque avec qui il partage de joyeux et amusants moments, et parfois même quelques bêtises comme avec ses autres amis manchots.
Parmi bien d'autres personnages, lors de la deuxième saison, Pingu rencontrera également Pingi, une jeune manchot avec qui il partagera le banc d'école et pour qui il aura quelques petits sentiments d'affection, elle-même en ayant tout autant pour lui.

S'il est une émotion que chacun ressent sur ce continent le plus froid du monde où vit Pingu, c'est bien la chaleur des sentiments qui traverse chaque aventure du petit manchot. Aussi avec un humour bienfaisant passant par les mouvements des personnages animés en stop motion, leur déplacement et ce qu'ils transmettent de vie, leur matière étant plus éloquente qu'un vocabulaire bien distinct, c'est tout un petit univers familial et social et avant tout joyeux que les petits téléspectateurs découvrent. Sous cette couverture de légèreté, le caractère de Pingu qui n'est pas sans petits défauts passagers – il se montre souvent impertinent, voire grossier – trouve également et sans nul doute quelques petits échos auprès des enfants, et particulièrement de ceux âgés entre 4 et 7 ans environ comme le petit manchot (si on lui prête une longévité humaine). C'est d'ailleurs en grande partie la personnalité de Pingu qui est mise en avant dans cette création pour mieux solliciter l'attention du jeune public (à partir de 3 ans et jusqu'à l'infini et au-delà...) auquel s'adresse la série.

Pingu est donc un petit manchot aux attitudes anthropomorphes dont le monde qui l'entoure, quoique situé sur le continent qui est tel un désert de glace, emprunte et y inclus moult détails du quotidien du jeune téléspectateur comme les divers éléments familiers à l'intérieur de la maison de Pingu (ou encore pour autre exemple, la présence de sapins...). Son nom qui en français rappelle celui du pingouin vient du mot allemand « pinguin » qui désigne dans la langue de Goethe un manchot mais aussi un pingouin.
Son créateur, Otmar Gutmann (1937-1993), maître de la claymation, avait précédemment modelé d'autres personnages de plasticine qui ont été fort appréciés de la jeunesse, notamment française, tels les Frédéric et Frédéric dans la série Lucie la terrible, ainsi que ceux de la série Les Musus (23 épisodes) qu'il créa pour Belokapi avec la musique de Dominique Laurent et qui furent présentés hors compétition au Festival international d'animation d'Annecy en 1981, ainsi que dans la célèbre Île aux enfants touchant à sa fin puis dans Le Village dans les nuages.
C'est peu après, en 1984, que le projet « Pingu » commence à prendre quelques menues formes et idées dont celle de Hugo pour le nom de notre petit héros qui apparaît alors dans quelques courts métrages sans lien avec la futur série.

La première production de Pingu fut entièrement de conception suisse avec 4 saisons de 26 épisodes chacune cumulant 104 aventures, le tout ayant été animé entre 1986 et 2000 par le Trickfilmstudio Otmar Gutmann et diffusé sur cette même période à la télévision suisse alémanique TV DRS (actuel SF Schweizer Fernsehen). Concernant la première saison, si elle s'étale de 1986 à 1990, les six premiers épisodes furent produits en 1986 puis le reste en 1989-90 (à ce moment-là, la forme des saisons n'était pas encore vraiment définie comme telle : 1986-90, 1991-94, 1995-96, 1998-2000). La série Pingu sera alors présente quasiment en continu (et dans un joyeux désordre) sur France 3 de janvier 1994 à juillet 2000, dans la programmation de Babar à celle des Minikeums, en passant par les Babalous.
Dans ce genre de production, pour le besoin d'un épisode et des diverses séquences le composant, chaque personnage est conçu en un grand nombre de modèles avec à la fois une variété de poses et d'expressions. Concernant Pingu et son entourage, chaque marionnette est fabriquée avec un noyau de polystyrène recouvert de plusieurs couches de pâte à modeler (il en est de même pour nombre d'éléments du décor). Pour partie, les artistes ayant donné forme à cet univers sont des artisans comme la plasticienne Nancy Zedi Moliterni ayant sculpté lors de la seconde partie de la première saison, puis encore après, divers personnages, décors et ustensiles : elle a depuis ouvert son atelier de sculpture « Atelier Platsch! » à Eglisau (Zurich).
Otmar Gutmann aura profité du succès grandissant de sa création sans toutefois en voir son développement dans la continuité car il meurt à l'âge de 56 ans alors que la production de la deuxième saison de Pingu se termine (pour la troisième saison lancée en 1995, le Trickfilmstudio Otmar Gutmann devient The Pygos Group). Son épouse Sonja Gutmann (née Graber en 1940) qui produisait la série du petit manchot pour la SRF (Schweizer Radio und Fernsehen) s'en est allée, elle, le jour de Noël de l'année 2011.

La seconde mouture de cette création a été produite au Royaume-Uni en 2003-04 et 2005-06 (2 saisons de 26 épisodes chacune) par le studio Hot Animation après que HIT Entertainment ait acquis en 2001, après avoir produit la 4ème saison avec le studio suisse, les droits de la série et de la totalité des épisodes précédemment produits. Ces saisons, 5ème et 6ème, ont été diffusées en France en 2004-05 sur France 3 dans France Truc. On notera en celles-ci pour la fabrication des personnages et autres éléments de décor la présence d'artistes du studio Mackinnon & Saunders, structure alors en plein travaux avec Bob le bricoleur et qui œuvrait dans le même temps sur l'une des plus célèbres séries de ce genre au Royaume-Uni, à savoir Pierre Martin le facteur
Les artistes anglais reprirent ainsi avec respect tout l'univers de Pingu précédemment mis en forme, conservant dans son ensemble le design des personnages et des décors, tout en renouvelant quelque peu leur apparence au travers de petits détails dans l'animation des marionnettes et la matière identique mais nouvelle qui les compose.

Enfin, en 2007-09, toujours produit par Hot Animation et HIT Entertainment, fut diffusée la série The Pingu Show (56 épisodes) sur la chaîne CBeebies de la BBC. Elle fut diffusée à partir de 2008 sous le titre Le Pingu Show sur France 5 dans Debout les Zouzous (rediffusée en 2012 dans Zouzous). Cette nouvelle série n'en était pas tout à fait une car après un nouveau générique (se terminant sur l'immeuble en forme de baleine) et une scène d'introduction comme une présentation pour le dit Show, c'est en fait deux anciens épisodes qui étaient alors proposés entrecoupés d'une petite séquence légèrement éducative sur la vie des manchots, et ce avec à la narration de celle-ci, comme pour l'introduction, la voix d'Antoine Nouel pour la version française.

A noter encore la production d'un court-métrage de 26 minutes intitulé Un mariage avec Pingu. Il fut produit en 1997 entre la 3ème et 4ème saison avec à sa tête Javier Garcia et Seishi Katto. A l'échelle de Pingu, dans la manière de conter une de ses aventures, ce court qui était comme un long métrage respectait le petit univers déjà bien installé à la télévision pour laquelle il fut produit. Il fut diffusé pour la première fois en France sur Tiji, en 2003, lors des fêtes de fin d'année, le 24 décembre.
Pingu a connu une renommée mondiale et ses aventures ont également été portées en de nombreux ouvrages comme les albums jeunesse illustrés par Tony Wolf (dont certains seront traduits en français aux Editions Artis-Historia au début des années 90), ainsi que sur diverses consoles de jeux vidéo...
On soulignera également pour la seconde production, qu'en 2004, le premier épisode de la 5ème saison – où Pingu fait des bonds un peu sur tout et construit un trampoline – fut présenté au Festival international d'animation d'Annecy, de même que le premier épisode de la 6ème et dernière saison en 2006.

La version française, comme toutes les autres, conserve les voix de la version originale car il n'y aucune traduction à réaliser, Pingu et ses congénères employant un langage qui leur est propre, fait notamment de diverses onomatopées. C'est au comédien italien Carlo Bonomi que l'on doit de pouvoir entendre la voix de Pingu de la 1ère à la 4ème saison, le public français connaissant déjà ses vocalises de par un exercice semblable qu'il avait produit pour la célèbre série La Linea et qu'il reproduit différemment ici pour le petit manchot dans un langage toujours aussi universel. En fait, ce langage s'inspire particulièrement du grommelot (grammelot en italien) né de l'art théâtral dont la phonétique puisant dans la langue de celui qui l'emploie n'est pas préétablie et se développe sur une certaine improvisation. Cela a notamment valu à la série La Linea de ne pas avoir été diffusée en Israël car l'acteur milanais introduisait dans ses paroles ainsi construites et sans en avoir aucunement conscience des gros mots en hébreu (à lire à ce sujet Jeux de parole. Le grommelot et la glossolalie ludique, deux plaisanteries linguistiques d'Alessandra Pozzo, EHESS, Paris). On ajoutera à cela un second élément de communication linguistique utilisé dans la série, à savoir l'écriture, celle-ci apparaissant à de multiples reprises notamment à l'école où est scolarisé Pingu, son alphabet évoquant légèrement le cyrillique.

Le public français abonné au Câble au début des années 90 (quelque un million de foyers) aura eu l'occasion de découvrir le petit manchot de l'Antarctique avant sa diffusion sur une chaîne française en janvier 1994, sur France 3 (puis quelques mois plus tard sur Canal J), ce en 1992-93 sur la chaîne allemande ZDF, cette dernière faisant alors partie de l'offre câblée, cela ne posant aucun problème de compréhension, Pingu comme précédemment souligné usant du seul langage manchot que tout le monde parle couramment.

Parmi nombre de détails et références en cette série, et qui touchèrent probablement et différemment les publics des nombreux pays où elle fut distribuée, on notera dès le 2ème épisode « Pingu aide à couver » que le petit manchot, casque sur les oreilles, écoute de la musique avec sa platine tourne-disque. La chanson que l'on entend alors (du moins lors des premières diffusions et exploitations de la série dans les années 90 depuis acquise par le Royaume-Uni qui a modifié quelques bandes sonores) avec le rire de Woody Woodpecker est Woodpeckers from Space du groupe néerlandais Video Kids ; cette chanson est sortie en 1984-85 et elle a eu un certain succès en France sur la bande FM encore libre où ce genre de production « à l'italo-disco » était fort appréciée. A propos de musique, l'acteur états-unien David Hasselhoff a enregistré en 1993, et essentiellement pour le territoire suisse, une chanson intitulée Pingu Dance dans un style touchant au rap et totalement dédié à Pingu. L'introduction de cette composition fut peu après reprise lors des saisons 3 et 4 comme générique de la série et elle remplacera l'ancien générique sur les deux premières saisons lors des rediffusions. On peut tout de même s'interroger comment un acteur jouant sous le soleil de Malibu s'est retrouvé au frais auprès de Pingu : peut-être parce que sa carrière de chanteur a débuté en 1989 sur le mur de Berlin en reprenant une chanson de l'artiste allemand Marc Seaberg.
On peut également découvrir au travers du métier du père de Pingu travaillant comme facteur, quand Pingu l'accompagne dans sa tournée, le bureau de la Poste où il officie et voir l'enseigne du bâtiment illustrée du dessin d'un cor postal (qui est aussi sur la casquette du papa de Pingu), instrument qui fut utilisé par les facteurs jusqu'au 19ème siècle, et qui est une référence au véritable logo des cars alpins de la Poste suisse ainsi que celui de la Deutsche Bundespost (devenu en 1989 Deutsche Post), la Poste allemande, le créateur de Pingu étant né en Allemagne et ayant vécu en Suisse.

On notera également quelques épisodes ne semblant pas suivre tout à fait le récit général comme le 14ème « Pingu fugue » où Pinga la petite sœur de Pingu est absente alors que l'action se déroule en partie lors du dîner, à la maison, et bien après la naissance de celle-ci (cet épisode, de par ici les figures qui se dessinent dans la glace et effraient Pingu, fait aussi partie d'une petite poignée d'épisodes posant problème sur un détail visuel et ayant été plus ou moins censurés lors de certaines exploitations de la série). Comme dans une ou deux autres aventures, cette absence peut s'expliquer en imaginant que la très jeune enfant se repose dans sa chambre.
A propos de chambre, on sera surpris de découvrir dans le 9ème épisode de la 3ème saison « Pingu se dispute avec sa maman », une fenêtre dans la chambre de Pingu alors que jusqu'alors vu de l'extérieur ou de l'intérieur de l'habitat, aucune ouverture de la sorte – mis à part la porte d'entrée – ne fut exposée au regard des petits téléspectateurs (mis à part sur d'autres habitations de cette petite communauté de manchots). Ainsi, selon les besoins du scénario dans un épisode (ici pour partir s'en être vu), quelques éléments comme celui-ci auront pu être mis en perspective sans aucune explication, les créateurs de Pingu laissant l'enfant libre dans ses interprétations (on reverra cette fenêtre dans le 22ème épisode de la même saison).
Du côté de l'animation, on remarquera également à quelques menus occasions de légères et « inhérentes erreurs » lors de la délicate manipulation des marionnettes, avec parfois un élément du décor comme un ustensile bougeant de quelques millimètres sans qu'aucune action n'ait été produite sur celui-ci, voire qu'un objet étant à un endroit sur un plan disparaisse sans explication sur le plan suivant, cela étant toutefois beaucoup plus rare.
Malgré ces petites « surprises » scénaristiques et visuelles, cette série offre pour les plus petits un bien bel univers entre le rêve et la réalité, ce de par la géographie des lieux et ses amusants petits occupants pour la rêverie, et avec moult petites situations et sentiments déjà plus ou moins ressentis par le jeune public pour le côté réaliste de cette petite vie en société et surtout en famille.

Pour conclure cet article, nous laisserons la parole à Pingu qui semble vouloir nous instruire d'une toute dernière et sans conteste primordiale information : « Nug Nug ! ». Voilà qui est dit !

Aux dernières nouvelles...

En 2017, une nouvelle série est produite au Japon par Polygon Pictures, Mattel et la NHK. Intitulée Pingu In The City (26 x 7 min) et diffusée sur NHK Educational à partir du 7 octobre 2017, elle conserve dans son ensemble le charme et les divers codes de la série d'antan, sans toutefois atteindre les chaleureuses émotions et les doux sentiments que pouvait procurer l'animation en stop-motion. En effet, le DandeLion Animation Studio (à ne pas confondre avec Dandelion Studios) qui œuvre ici à la conception et l'animation de cette série utilise la 3D CGI (avec entre autres logiciels : Houdini, Maya, Redshift) pour donner forme et vie à ces nouvelles aventures de Pingu se déroulant en un nouveau décor, celui d'une grande ville dont les habitants sont évidemment des manchots. Si l'image de synthèse peut ainsi reproduire la matière avec une extrême précision jusqu'à la perfection des détails sur chaque image comme en toute production de ce genre, cela reste une image et elle ne peut pas totalement se substituer aux propriétés vivantes et légèrement imperfectibles de la matière argileuse d'où est né Pingu (et il en est de même pour l'espace et la manipulation des figurines). Cela dit, Pingu In The City est un amusant divertissement développant avec simplicité son humour autour de la personnalité de Pingu. A ce jour, en août 2018, la série reste inédite en France.

Le titre des épisodes n'apparaissant pas à l'écran, certains varient selon les sources. Ainsi l'INA présente pour la 1ère, 2ème et une partie de la 3ème saison de nombreux titres qui diffèrent jusqu'à faire même des erreurs comme celui où le « grand-père » ainsi cité est remplacé par la « grand-mère » (3ème épisode de la 3ème saison), personnage n'existant pas dans cette production (le titre du 19ème épisode où un jeune manchot se déplace en fauteuil roulant dans la 2ème saison utilise également à tort le terme pingouin). Il en est de même pour l'édition DVD française de la série regroupant en un certain désordre, de la 1ère à la 6ème saison, une sélection de 78 épisodes sur 6 volumes, soit la moitié de la série celle-ci étant composée de 156 épisodes pour 6 saisons. On notera tout de même que les quatre premières saisons (la production suisse) furent proposées entre 1995 et 2001 en intégralité chez BMG Vidéo en une série de 26 VHS sous le titre générique « Pingu et ses amis » (104 épisodes), mais hélas déjà dans le désordre excepté pour le tout début de la série (les premières VHS furent éditées en 1995, puis en 1997 accompagnées d'un fascicule).