Frère des Ours

Dans les montagnes d'Amérique du Nord, après la mort de son frère ainé Sitka lors d'un combat contre un ours, Kinaï pourchasse et tue l'animal dans un accès de vengeance. Ce faisant, il s'attire les foudres des esprits de la forêt qui le punissent en métamorphosant le jeune homme en ours ! Pour empirer les choses, Denahi, le deuxième grand frère de Kinaï, ignorant ce qui est arrivé à son cadet, pense que l'ours qu'il est devenu est responsable de la mort de celui-ci et le prend en chasse !

Pour retrouver son apparence humaine, Kinaï doit se rendre en haut de la montagne où "les lumières du ciel touchent la terre" pour y retrouver l'esprit de Sitka. Durant son périple, il fait la connaissance de Koda, un jeune ourson séparé de sa mère. D'abord agacé par le petit ours, Kinaï finit progressivement par s'y attacher et à s'adapter à sa nouvelle condition...

L'idée de ce film naquit de nombreuses années avant sa sortie, à l'époque de la production du Roi Lion. Après un certain temps de gestation, le projet tombe entre les mains de Aaron Blaise qui se voit confier sa réalisation, rejoint par Robert Walker. Le scénario va alors connaître plusieurs changements, notamment concernant le personnage du père finalement remplacé par deux frères. La fraternité devient ainsi l'un des thèmes principaux du film, surtout en tenant compte de la relation entre Kinaï et Koda ! Notons que si Aaron Blaise a participé à de nombreuses productions animées, celle-ci fut sa seule réalisation avant qu'il ne soit emporté par une crise cardiaque en 2015.

Pour concevoir les splendides dessins du film, l'équipe a fait beaucoup de repérage dans plusieurs régions américaines en plus de s'inspirer des peintures de l'artiste Albert Bierstadt. Un choix très audacieux (pas toujours respecté par les diffusions en vidéo ou à la télévision) a été fait concernant le format de l'image, qui change en milieu de film (au moment où Kinaï devient un ours), passant du 1.85:1 (16/9) au 2.35:1.
Au niveau du ton, si le film n'est pas dénué de gravité (la mort et la vengeance nourrissent largement l'intrigue), l'humour y reste bien présent, grâce à la galerie de personnages secondaires hauts en couleurs que l'histoire propose. Du côté de la bande-son, les parties chantées sont signées Phil Collins, comme sur Tarzan. En revanche, cette fois-ci, il co-signe également les musiques instrumentales et ne chante pas à chaque chanson. Par contre, il participe là encore également à la version française, où les chansons ont été adaptées par son épouse de l'époque et dirigées en partie par David Halliday, qui avait auparavant doublé le personnage de Jim Hawkins dans La Planète au Trésor.

D'autres vedettes ont participé au film. Ainsi, dans le doublage français, le duo comique Kad et Olivier double les deux élans Truc et Muche. Un autre duo comique, Omar et Fred, peut être entendu sur les deux béliers au prises avec l'écho de leur propre voix ! Annie Cordy, qui avait interprété Grand-Mère Feuillage dans Pocahontas, se charge ici de Nanaka. Enfin, le judoka David Douillet prête sa voix grave à l'ours Goliath !
En VO, Kidai bénéficie du timbre de Joaquin Phoenix tandis que les deux élans sont interprétés par Rick Moranis et Dave Thomas. Quant à l'ours Goliath, c'est à l'imposant Michael Clarke Duncan qu'il a été confié. Notons aussi que, triste ironie du sort, Denahi fut le dernier rôle du jeune acteur Jason Raize, qui s'est donné la mort le 3 février 2004 à l'âge de 28 ans...

Frère des Ours eut un accueil plutôt tiède à sa sortie. Pris en tenaille entre les productions en images de synthèse comme celles de Pixar ou de Dreamworks, cette production semblait presque anachronique ! Le résultat aux box-office resta honorable (ce qui motiva surement la création d'une suite, sortie directement en vidéo en 2006), y compris en France, en dépit de la décision curieuse de ne sortir le film qu'à la fin janvier 2004 au lieu de la fin de l'année précédente comme en Amérique (profitant ainsi de la période de Noël). Néanmoins, Disney décida de stopper la production de longs-métrages en animation traditionnelle pour le cinéma, fermant ainsi plusieurs de ses studios (dont celui de Montreuil en France). Les fans des dessins animés "à l'ancienne" n'eurent pour toute consolation que la sortie l'année suivante de la dernière production de ce type déjà entamée, la peu ambitieuse Ferme se Rebelle ! De rares projets en animation traditionnelle finirent par être proposés au cinéma malgré tout (notamment La Princesse et la Grenouille en 2009) mais l'ordinateur restera largement majoritaire.
Aujourd'hui un peu tombé dans l'oubli, Frère des Ours reste une production de qualité mais qui a eu la malchance de naître au mauvais moment et qui devint malgré elle un symbole de la fin d'une époque...